jueves, 4 de enero de 2018

Un tal Klapánek, visto por Pierre-André Sauvageot


Este delicioso cortometraje sobre el insólito director de las esclusas de Praga y la casa que se hizo construir en el valle de Sarka, es la primera muestra cinematográfica surrealista del año 2018. Compañía musical: la primera gimnopedia de Satie.
Un certain Klapánek parte del texto del surrealista checo Prokop Voskovec “Surtout ne pas se mouiller!”, traducido al francés en 1990 y que vale la pena leer antes o después de ver la acuática película:
“L'historiographie marxiste officielle, qui depuis plus de quarante ans filtre prudemment la chatoyante richesse des faits historiques, n'a évidemment pas même effleuré le thème des piscines pragoises. Entre autres, sans doute, parce que tout ce qui touche à la nudité du corps humain sape en fait à la base la vision de l'Histoire fondée sur la théorie des classes, sans parler de l'évidente –et inquiétante– métaphysique de l'élément aquatique.
L'eau est en réalité l'unique élèment qui puisse envelopper le corps dans son ensemble et dans sa totalité. Le directeur de la première écluse pragoise, un certain Horteli Klapánek qui, au siècle dernier, passa ses meilleures années à chercher ce qu'il appelait le contact total –profondément déçu par l'amour où l'étreinte la plus étroite laisse de grandes parties du corps non touchées– a finalement, après avoir avoir testé en vain toutes sortes de matières (des années de travail avec le velours), trouvé l'eau. La maison qu'il s'est fait construire à la prériphérie de Prague, dans la vallée de Sarka, et que le maire a fait détruire après sa mort scandaleuse, pourrait constituer une piscine idéale, que je crois unique dans le monde entier. Le système de contacts total conçu par Klapánek mérite donc quelques mots.
Horteli avait fait fabriquer une valise étanche, de dimmensions correspondant à sa taille moyenne, et chaque fois qu'il éprouvait le désir métaphysique d'un contact total, il remplissait la valise d'eau, s'y laissait enfermer, puis véhiculer jusqu'à sa maison. Là, on introduisait la valise dans un monte-charge spécial qui la hissait jusqu'au grenier servant de réservoir d'où l'on déversait le propriétaire dans une anti-chambre, ou mieux dans une première piscine. Un mystérieux système d'écluses permettait ensuite à Klapánek de couler à son gré de pièce en pièce et d'étage en étage. Les chambres correspondaient à leur usage habituel, toute la différence était dans le fait qu'il s'agissait en même temps de piscines décorées avec goût. Ce qui fit scandale, c'était une piscine souterraine et secrète, conçue comme un caveau de famille. Après la mystérieuse disparition d'une aristocrate bourgeoise et de Klapánek lui-même, on découvrit des tuyaux conduisant au caveau depuis un bassin caché où l'on trouva des restes d'un dissolvant puissant. Klapánek, sans doute, s'était laisé dissoudre avec sa maîtresse, et ils avaient coulé ensemble dans les conduits du tout-à-l'égout municipal. En plus du fait que Klapánek appartient sans conteste à la riche gamme des personnages magiques dont Prague regorgeait à l'époque, l'affaire fut exploitée politiquement”.
klapánek